Faut-il désormais craindre le contrôle technique tous les ans pour les voitures ?

La directive européenne recommandant de passer le contrôle technique tous les ans au lieu des deux ans actuels fait vivement réagir. Si l'exécutif avoue ne pas songer pour l'instant y souscrire, l'organisme Mobilians, qui défend les intérêts du secteur automobile en France, y est… tout à fait favorable. Au nom de la sécurité, seulement ?
Le contrôle technique tous les ans, les propriétaires de véhicules utilitaires légers connaissent déjà. Mais il s’agit surtout d’une alternance avec une simple visite annuelle pour la seule pollution, les multiples points de contrôles de sécurité restant à faire tous les deux ans, comme n’importe quelle voiture particulière. Sauf que, dans le cadre d’un paquet de lois sur la sécurité poussé par la Commission européenne, cette dernière a proposé fin avril de rendre obligatoire le contrôle technique pour les VUL et les véhicules légers tous les ans… uniquement pour les véhicules de plus de 10 ans.
Une préconisation qui n’est pas encore votée, et qui pourrait déjà se heurter à la position ferme du gouvernement français. Pour l’instant. “Mon collègue Benjamin Haddad (ministre délégué chargé de l’Europe) et moi y sommes résolument opposés", avouait en effet le ministre des Transports. Mais camperont-ils toujours autant sur leurs positions face au lobbying de certains partis ou organismes ? À commencer par Mobilians, qui vient de se positionner clairement en faveur du contrôle technique tous les ans. L’organisme, on le rappelle, défend les intérêts des professionnels de l’automobile, qui comprennent évidemment les centres de contrôle technique.
Tous les ans, au nom de la sécurité ?
“Dans le cadre de la révision de la Directive contrôle technique, la Commission européenne envisage l’annualisation du contrôle technique pour les voitures particulières et les utilitaires de plus de 10 ans. Le Parlement européen et le Conseil vont désormais travailler sur cette proposition soutenue par Mobilians, qui rappelle une nouvelle fois le rôle crucial du contrôle technique dans le bon entretien du parc”, indique l’organisme. Lequel précise que le changement permettrait d'accélérer la transition du parc automobile français, vieillissant.
“Il convient donc de considérer ce sujet avec pragmatisme : maintenir un rythme bisannuel équivaut à accepter que plusieurs millions de véhicules non conformes – non contrôlés depuis 13 ou 20 mois – circulent sur nos routes, emportant des conséquences sur la sécurité routière et l’environnement.” Faudrait-il déjà convaincre tous les Français de passer le contrôle à temps, puisqu'une récente étude affirmait qu'une part des Français roulent avec un CT expiré, jugeant ce test inutile et coûteux.
Le contrôle de trop ?
Ses arguments sont parfois étonnants. Mobilians explique notamment qu’un des bénéfices du contrôle technique annuel serait une meilleure prévention des pannes pour détecter “plus tôt les défaillances ou les signes d'usure (freins, suspensions, corrosion, etc.)”. Une corrosion ou une usure des suspensions se développent-elles si vite qu'elles nécessitent un regard professionnel tous les ans ? Globalement, la plupart des arguments avancés en faveur de l’annualisation ne concerneraient finalement que les très gros rouleurs, qui usent effectivement leur véhicule beaucoup plus vite. Mais rappelons que le kilométrage moyen des Français est sous les 15 000 km annuels… On imagine que la pilule passerait très mal pour bon nombre de Français, dont le budget auto a déjà explosé ces dernières années : assurance, entretien, carburant, prix d’achat, péages. Elle passerait d’autant plus mal pour ces foyers qui possèdent plusieurs véhicules, avec un contrôle technique désormais facturé près de 80 € en moyenne. Près de 200 € par an à partir de deux véhicules, une somme qu’on imagine impensable pour beaucoup.
Un changement aussi pour les deux-roues ?
Pour l’heure, le gouvernement français fait donc blocus. Mais pour combien de temps encore, face aux appels du secteur et à l’argument économique ? Une autre question devra également se poser en cas de passage du contrôle technique à l’année. Depuis 2024, les deux roues doivent en effet se soumettre au contrôle au même titre que les voitures. Et si ces dernières passent à la visite annuelle, il y a fort à parier… que les motos et autres scooters âgés suivront ! On imagine alors la colère d’un public déjà fortement réfractaire au contrôle technique… tout court.
Journaliste automobile (et un peu bicyclette aussi). Autant passionné par la nouveauté que l’industrie ou l’environnement, mais aussi tout ce qui fera avancer la mobilité.