Cadre fiscal peu incitatif, aides complexes à mobiliser : à quoi joue le gouvernement avec les utilitaires électriques ?

Comme les voitures électriques, les utilitaires "zéro émission" ont vu leurs aides fondre comme neige au soleil cette année. Pire encore, en 2025, c’est un parcours du combattant pour obtenir des subventions. De quoi décourager les professionnels du secteur et s’orienter vers des motorisations plus traditionnelles.
Ça n’aura sans doute pas échappé aux professionnels qui disposent d’une flotte de véhicules utilitaires : les règles du jeu ont changé en France en 2025 concernant les modèles 100 % électriques. Depuis décembre 2024, les utilitaires électriques n’ont plus le droit au bonus écologique en tant que tel, comme c’est encore le cas pour les voitures électriques. À la place, le gouvernement a remplacé cette aide au profit d’un système de subventions basé sur les certificats d’économies d’énergie (CEE). Un dispositif que nous retrouvons aussi sur les voitures électriques, mais à des niveaux de subventions moindres puisqu’ils s’ajoutent au bonus écologique.
Offre pléthorique et demande famélique

Jugé complexe, ce mécanisme propose des aides comprises entre 2 600 et environ 4 400 €, un soutien jugé insuffisant au regard des besoins réels. Rappelons que les aides étaient parfois deux fois supérieures à celles en vigueur actuellement il y a encore moins de deux ans. Pour ne rien arranger, les VUL électriques restent désavantagés par rapport aux voitures électriques sur le plan fiscal : amortissements limités, taxation inchangée pour les véhicules de société, et avantages en nature non alignés. Bref, le cocktail est parfait pour ne pas encourager les professionnels à se tourner vers ces nouvelles énergies.
Le gouvernement n’étant pas à une contradiction près, rappelons que l’Union européenne impose l’arrêt de la vente des véhicules utilitaires légers (VUL) thermiques neufs d’ici 2035, comme pour les voitures. Et malgré une offre industrielle qui s’étoffe, notamment grâce aux marques du groupe Stellantis et à Renault la demande reste timide, freinés justement par les obstacles cités plus haut.
6,5 millions de VUL en circulation en France
Pourtant, s’il y a bien un pays où les ventes d’utilitaires électriques doivent exploser, c’est bien en France. L’Hexagone compte tout simplement le plus grand parc européen, avec 6,5 millions de VUL en circulation à fin 2024, le tout en représentant pas moins de 16 % des émissions de gaz à effet de serre du transport, soit environ 5 % des émissions totales du pays. L’an passé, 43 modèles de VUL zéro émission étaient disponibles sur le marché, et ce chiffre devrait même dépasser l’offre thermique dès 2026.
Mais avec des aides de plus en plus faibles et des prix catalogue toujours assez éloignés des équivalences thermiques (même si un équilibre est attendu d’ici la fin de la décennie avec la baisse du prix des batteries), l’utilitaire électrique a du mal à s’imposer. Preuve en est, ils n’ont représenté que 7 % des nouvelles immatriculations de VUL en 2024, tandis que le diesel reste dominant avec 78 %. Pourtant, avec ces objectifs environnementaux plutôt ambitieux (l’Europe vise une moyenne de 91 g/km dans le secteur d’ici 2030), l’électrique devrait prendre son envol.
L’Europe bientôt au secours du VUL électrique ?

Outre ces barrières dressées de manière indirecte par le gouvernement, du côté des clients, l’électrique peine encore à séduire, notamment les petites structures, qui continuent de privilégier l’achat d’occasion, faute de pouvoir absorber le coût initial plus élevé des modèles électriques. Même si les autonomies, comprises entre 250 km pour les plus « mauvais » élèves et plus de 450 km pour les meilleurs, convient à la majorité des besoins des entreprises, cela peut encore représenter une forme de frein à l’achat, en plus des problématiques liées à la recharge.
L’organisme Transport & Environment (T&E) propose plusieurs leviers pour accélérer la transition : stabiliser les objectifs européens, améliorer les incitations fiscales, introduire un éco-score spécifique aux VUL, et mettre à contribution les plateformes de commerce en ligne via une taxe sur les livraisons urbaines, destinée à financer les transports publics.
D’une manière générale, compte tenu que la France plaide globalement pour une révision des objectifs environnementaux pour le secteur automobile et l’Allemagne pour des subventions à l’échelle européenne, le gouvernement semble avoir adopté, pour 2025, des solutions de transition, en attendant des décisions plus concrètes d’ici quelques mois, des solutions qui devraient également lui coûter indirectement moins cher si elles sont amenées à être généralisées à l’échelle européenne. En attendant, le marché patine, les offres de véhicules utilitaires sont toujours plus nombreuses, et les clients encore réticents.